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Le besoin de reconnaissance, piège ou élan créateur?


Le besoin de reconnaissance ou de valorisation est souvent jugé négativement par plusieurs. Pourtant, ce besoin est légitime et fondamental chez tout être humain, comme l’est, par exemple, le besoin d’amour. Il est donc important de savoir comment s’en occuper et de faire ce qu’il faut pour le nourrir; sans toutefois glisser dans le piège de la performance malsaine, car alors, au lieu d’augmenter l’estime de soi, on pourrait faire le contraire.

Le besoin d’être valorisé pour reconnaitre sa propre valeur
Le besoin de reconnaissance est légitime, car «reconnaitre» signifie «identifier». Lorsque, par exemple, un enfant est reconnu par ses parents, il est vu dans son identité, dans ce qui est unique en lui, dans ce qui caractérise sa personnalité, dans ce qui le distingue d’un autre. L’effet est le même une fois que cet enfant est devenu adulte. Être valorisé par une personne importante pour nous signifie ni plus ni moins exister aux yeux de cette personne et faire une différence pour elle. Cela donne un sens à notre présence dans la vie de l’autre et dans la vie tout court.

C’est donc dire que le besoin de reconnaissance est donc loin d’être un caprice de l’Ego, car une personne qui se sent reconnue dans sa véritable identité et à laquelle on accorde une juste valeur ressentira un élan très puissant vers la réalisation d’elle-même. Il s’avère donc important de savoir s’occuper de son besoin de reconnaissance dans nos relations.

S’occuper de son besoin de reconnaissance dans ses relations
Si je juge négativement un aspect de moi, je ne m’en occuperai pas. Par exemple, si je juge mon besoin de me reposer, je ne l’écouterai pas et je risque de m’épuiser et de dépasser mes limites. Si je n’accueille pas mon besoin de reconnaissance avec légitimité, je risque de ne pas m’en occuper ou de m’en occuper par la bande, donc défensivement. Il va sans dire qu’identifier et accepter notre besoin de reconnaissance sont des prérequis essentiels à notre capacité à en prendre soin.

Avoir besoin de reconnaissance de la part de notre conjoint, nos enfants, notre patron, notre famille n’est pas, contrairement à une pensée populaire, une forme de dépendance affective. Se reconnaître soi-même est important, mais pour y arriver, nous avons d’abord et aussi besoin d’être reconnu par les autres. Colette Portelance parle dans son livre Aimer sans perdre sa liberté, d’une interdépendance saine en relation.

«Être interdépendant dans une relation affective, c’est accepter d’avoir besoin de l’autre et être assez autonome pour assumer la responsabilité de ce besoin.»

On deviendrait dépendant si on voulait que l’autre devine nos besoins et si on espérait que toute notre valeur nous soit donnée par la valorisation de l’autre. Mais exprimer notre besoin, tout en laissant l’autre libre d’y répondre ou pas, nous rend autonome, comme quelqu’un qui a soif et qui se dirige lui-même vers le puits.

Mais, peu de gens ont développé cette aptitude saine de s’occuper de son besoin de reconnaissance. Et comme il est fondamental pour tout être humain, s’il n’est pas identifié et accepté, et qu’on ne s’en occupe pas directement, il peut mener à des comportements destructeurs. Comme certaines personnes qui se cachent avec leurs talents, inhibent leurs qualités, se dénigrent et ne se réalisent que très peu. Elles ne vivent pas à la hauteur de leur valeur et ne réalisent même pas qu’elle manque de valorisation. Quel dommage! Par contre, d’autres glissent dans un comportement inverse, comme la performance malsaine.

La performance malsaine
La performance, qui signifie «réussir de manière remarquable, se surpasser, exceller…», n’a rien de négatif en soi. Loin de moi l’idée de nier l’influence positive des performances saines sur l’estime de soi, car elles rehaussent le sentiment de valeur personnelle et le sentiment d’être importants.

En fait, la performance devient malsaine quand une personne associe sa valeur personnelle seulement à ses réussites et qu’elle érige son estime personnelle principalement sur les appréciations reçues quant à ses performances. Dans ces cas-là, cette personne s’identifie à son insu à ce qu’elle fait et non à ce qu’elle est. Ainsi, elle cherche désespérément à être aimée et reconnue pour ses exploits, alors qu’au fond, son besoin réel est de se sentir aimée et reconnue pour la personne qu’elle est. Sa vie et sa valeur deviennent, dans ces moments, centrées sur le «paraître» et non sur l’«être». Et son drame est qu’elle finit par croire avec certitude que les personnes de son entourage lui accordent leur affection et leur attention uniquement parce qu’elle réussit ce qu’elle fait et non parce qu’elle-même, dans son essence, en vaut la peine.

Alors, cette personne peut se retrouver dans un cercle vicieux. On la voit augmenter toujours plus ses performances, s’étourdir de plus en plus dans tout ce qu’elle fait, réussir souvent très bien, même exceller dans ses domaines de prédilection, comme un athlète olympique, mais n’être jamais comblée fondamentalement sur le plan de la reconnaissance. Au fond, toutes ses performances cachent un sentiment de médiocrité, de manque d’estime personnelle. Face à ses performances, cette personne peut soit se valoriser elle-même de façon à rendre les autres mal à l’aise de l’entendre, se vanter, exposer régulièrement ses réussites pour attirer des mots de félicitations, et cela, sans exprimer directement son besoin de valorisation. Ou encore, elle peut être de type à se dévaloriser, à ne pas voir son mérite, à ne jamais être satisfaite d’elle-même, à toujours vouloir plus de perfection dans ce qu’elle fait. Ces types de comportements cachent tous deux une piètre estime personnelle, malgré que ces personnes ont des talents réels et une valeur réelle. Alors, elles pourraient se servir de ceux-ci dans un dépassement de soi qui augmenterait leur estime. Quelle serait la différence?

Le dépassement de soi
À vue d’œil, il n’y aurait peut-être pas beaucoup de différences entre les deux comportements, mais les motivations aux comportements seraient complètement à l’opposé l’une de l’autre.

Le problème avec la performance malsaine est que la personne qui a intégré ce mode de fonctionnement part de ce qu’elle pense devoir FAIRE et ACCOMPLIR pour ÊTRE quelqu’un qui a de la valeur; plutôt que de partir de ce qu’elle EST, d’y accorder de la valeur, pour ensuite FAIRE et ACCOMPLIR quelque chose avec.
- Elle peut être virtuose en violon, sans s’être posé la -question: est-ce que j’aime vraiment ça, jouer du violon?
- Elle peut s’entrainer à un sport au point de se faire mal physiquement.
- Elle peut nier plusieurs de ses besoins, pour se concentrer seulement sur l’activité dans laquelle elle brille.

Pour elle, arrêter ou ralentir n’est pas une option, puisque la réussite de la performance visée représente la confirmation (bien illusoire) de sa valeur personnelle.

Le dépassement de soi est tout autre. Il prend sa source dans l’unicité de la personne, ses besoins réels actuels, il tient compte de ses limites, de ses zones de vulnérabilité autant que de ses forces, de ce qu’elle aime ou n’aime pas.

Se dépasser peut consister à demander à notre professeur de danse sociale de nous faire une place dans le spectacle de fin d’année, par envie de vivre une expérience de scène, par amour de la danse, par besoin de dépasser sa gêne et de vaincre sa timidité, et non pour performer ou pour prouver aux autres quelque chose.

Se dépasser peut aussi simplement être d’avoir le -courage de dire à l’être aimé: j’ai besoin d’être aimée de toi.

Se dépasser peut signifier de partir en affaires, d’offrir un produit qui lui ressemble totalement et auquel il croit vraiment, non pour épater les autres, mais pour satisfaire ses besoins de création et d’intégrité en affaires.

Dans ce dernier exemple, les valorisations des autres qui le nourriront dans son estime personnelle porteront alors, non pas sur son chiffre d’affaires et ses accomplissements à cet égard, mais sur son courage, son intégrité, sa capacité à suivre son élan intérieur malgré ses peurs, ses habilités d’affaires, son intuition, sa capacité à s’entourer des bonnes personnes, sa discipline, etc., bref toutes ses qualités issues de son être qui lui auront permis d’arriver à satisfaire ses besoins de création et d’intégrité. C’est ce qu’il est qui lui aura dicté l’action juste à poser et non le besoin de prouver sa valeur ou de performer.

À partir de l’instant où c’est l’être, la personne que nous sommes vraiment, notre essence qui est à la source d’une action, d’un choix, d’un désir de réussite, tout le déploiement de nos ressources mènera à un dépassement de soi, c’est-à-dire à l’expression du meilleur de nous-mêmes dans le moment présent. Et ces actions auront le pouvoir de nourrir réellement notre estime de soi, puisque c’est ce Soi qui est la source du résultat.

Être reconnu pour qui on est
Un comportement répétitif de performance malsaine nourrit l’image irréelle de la personne idéale qu’on pense devoir être pour être reconnu, alors que le dépassement de soi nourrit l’être réel qu’on est. Les deux modes de fonctionnement exigent des efforts, de la discipline, de la rigueur, mais la satisfaction obtenue par la performance malsaine reste éphémère et doit toujours être suivie d’un nouveau défi encore plus grand, alors que celle atteinte par le dépassement de soi nourrit l’estime de soi pour toujours.

Et, comme le besoin de reconnaissance est légitime, il est essentiel de s’en occuper et de s’assurer qu’on reçoit assez de valeur à travers le discours de nos proches. Car être reconnu nous aide à prendre conscience de la valeur qu’on a. Et plus on sait qui on est, plus on est conscient de notre valeur, plus on est motivé à se réaliser, à créer à partir de notre unicité et plus notre pulsion de vie vibre et se déploie, pour le mieux-être de tous.

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